Voyage de printemps à Kyôto
L'après-midi de printemps s'acheva dans une atmosphère sereine égayée par les chants des oiseaux...
...qui ne se laissèrent point troubler par les vibrations sourdes de la cloche du temple toquée par un long bâton quand se fermèrent les portes du complexe du Byôdô'in
Notre dernière visite fut pour le musée situé dans l'enceinte du Byôdô'in qui nous laissa sur l'enchantement des vestiges décoratifs sauvegardés de l'Amidadô
Voletant sur de légers nuages et ayant gardé quelques traces de polychromie, de gracieuses statues de Bosatsu musiciens se répandent en sons mélodieux donnant un avant-goût du paradis

Byôdô-in - Bunchin – Poids en fonte
Répliques des poignées des portes de la chapelle du Bouddha Amida
Fleur de chrysanthème contenue dans une forme végétale stylisée
Le sac lesté d'un petit poids en fonte comme souvenir de la journée, nous décidâmes d'aller plus avant dans la contemplation des innombrables cerisiers de la ville d'Uji
Uji célèbre, dans de nombreux sites disséminés dans la ville, le souvenir d'une œuvre littéraire de première importance dans la vie culturelle du Japon depuis des siècles et qui inspire encore les artistes contemporains

Genji monogatari sansaku no michi, le chemin du Genji
Jalon rencontré partout en ville afin d'aller symboliquement à la rencontre du Genji
Les aristocrates de l'époque Heian avaient l’habitude de partir en villégiature dans leurs résidences de campagne aux environs de la capitale, la ville d'Uji proche de Kyôto fut donc le lieu privilégié pour voir s'y dérouler les aventures du prince Genji

Représentation d'un épisode du roman dans lequel le prince Kaoru et l'héroine Ukifune naviguent dans une petite embarcation sur la rivière Uji
Ce roman, écrit par Murasaki Shikibu, dame d'honneur d'une impératrice, fille du tout puissant ministre Fujiwara no Michinaga, conte l'histoire des amours contrariées du Hikaru Genji "le prince radieux" et de son fils, le prince Kaoru "le prince parfumé" dans une cinquantaine de chapitres où la psychologie des personnages largement empreinte de mélancolie est décrite avec une acuité remarquable
Ce roman foisonnant peut être considéré comme la quintessence de la civilisation aristocratique de la Cour de Heian
Le célèbre pont d'Uji, témoin de tant d'évènements dramatiques, ne fait vraiment plus rêver !

Ujibashi, le pont d'Uji enjambant l'Ujigawa, la rivière Uji
Reconstruit en béton et actuellement sous travaux d'embellissement !
Heureusement, plusieurs autres ponts se donnant des airs antiques dans l'espoir de faire oublier leur structure en béton, arborent des rambardes en bois d'un beau rouge vermillon afin d'agrémenter les balades le long de la rivière

Les ponts rouges ne passent pas inaperçus au milieu des verts printaniers des collines environnantes !
Les berges de l'Ujigawa se parent au printemps de multiples cerisiers qui font oublier quelque peu les abords de la rivière habituellement assez ingrats
La floraison des Sakura au début avril donnent prétexte à des divertissements festifs qui se déclinent en propositions diverses et variées
Pour fêter les fleurs, il est d'usage d'aller se distraire en bonne compagnie pour manger mais surtout pour boire et en général autre chose que l'excellent thé produit à Uji !
Tout au long de la rivière, des auberges traditionnelles proposent des salons particuliers pour la détente avec terrasses surplombant les berges offrant le privilège d'une vue imprenable sur les arbres en fleurs !
Mais étaler une bâche au sol, près de la rivière, en prenant la précaution indispensable d'apporter provisions et boissons procure aussi bien du plaisir dans la contemplation des cerisiers annonçant l'arrivée du printemps

Sur les berges de la Ujigawa, préparation du Hanami pour la soirée
Avec petite laine car la température de la soirée s'annonçait frisquette !
Le chemin du retour vers la gare passait dans un quartier commerçant, et si la proximité de la capitale enfle quelque peu les prix, je ne fus pas mécontente de mes trouvailles !
Les restaurants à Uji proposent leur spécialité de Zarusoba, les nouilles de sarrasin dégustées froides trempées dans une sauce au soja, mais dans cette ville, la farine de sarrasin est évidemment additionnée de thé vert !

Uji - Restaurant de Soba dont le Noren, le rideau de porte, déployé indique que l'établissement est ouvert

Détail du Noren
Le coton écru du rideau s'orne de motifs de fleurs printanières joliment imprimées au pochoir
Les pâtisseries traditionnelles, comme partout au Japon, affichent pour leur décoration les motifs récurrents des saisons, ainsi au printemps les roses pimpants s'étalent plaisamment dans les vitrines

Uji - Ochaman honten - Pâtisserie aux couleurs du printemps
Maison-mère possédant d'autres succursales dans la ville (cf.mon premier article)

Détail de la vitrine - Poèmes célébrant le printemps
De la poésie dans les pâtisseries, au Japon c'est possible !
Pour contrer tout ce rose un tantinet trop douceâtre, il nous fût impossible de résister à nous munir de vert !

Omanju - Gâteaux cuits à la vapeur, composés de farine, de fécule et de sucre fourrés de Anko, pâte de haricot sucré
Sur de petites brochettes des Dango faits de riz mochi
A Uji, des Cha Dango parfumés au thé vert bien sûr !
Petites douceurs qui agrémentèrent le voyage du retour, avant de récupérer en gare de Kyôto, notre commande de Bento du matin, des petites cassolettes en céramique contenant des morceaux de poulpe cuisinés avec du riz aux légumes
Les huit bras des poulpes étant étirés en étoile (Hipparu) afin de les faire sécher évoquent un grand nombre de personnes qui en demandent d'où l'expression Hipparidako "celui qui est très demande"
Le nom de cet Ekiben, Bento de gare, contenant du poulpe est donc un jeu de mot, très fréquent dans la langue japonaise, ici sur Tako le poulpe

Ekiben de Kyôto - Takikomi gohan, riz braisé avec champignons, épinards, carottes...
A déguster avec un bon saké !
Uji recèle bien d'autres sites à découvrir ...
...Au prochain séjour peut être...